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Publié le : 11 octobre 2005
Président

JESUS HURTADO :

« Moi je suis arrivé à l’Asti en 1990 pour donner des cours de français.

J’ai fait ça pendant 3 ou 4 ans puis j’ai fait de la coordination ce qui était très instructif parce que ça montre l’autre côté du décor, ce que ne voient pas les formateurs ,c’est à dire tout les entretiens , le recrutement , expliquer aux gens ce qu’est l’association , dans quel type d’association ils arrivent , le type de public qui est quand même particulier(ciblé) -ils sont immigrés mais beaucoup de gens sont aussi en situation très précaire- gérer l’équipe , préparer la rentrée. C’est un gros travail qui n’était pas aussi important à mon époque qu’aujourd’hui, parce que ce n’était pas aussi développé. Le poste de coordinateur demande beaucoup de travail, essentiellement de communication : si le briefing de l’équipe a été bien fait, tout le reste doit en principe bien se passer.

J’ai fait de la coordination pendant à peu près 9-10 ans ; à l’époque le président était Frédéric, puis on a eu une Assemblé Générale à laquelle il n’a pas souhaité se représenter à la présidence et c’est alors que j’ai été élu au poste de président de l’ASTI ; j’ai alors vu un côté que je ne connaissais pas de l’association. Parce qu’en fait depuis que je suis là, je n’ai jamais fait la même chose, je suis toujours passé sur des postes de bénévolat différents. Par contre le poste de président m’a montré l’autre côté de l’association, parce que ce n’est plus du bénévolat en direct avec les usagers, les gens des Permanences Juridiques ou des Cours de Français, Permanences Administratives, là on travaille vraiment avec le conseil d’administration et on fait de la recherche de financement. C’est faire tourner l’association mais plus dans l’organisation quoi !

Voilà donc je fais ça depuis 4 ans et ça me plaît à fond sinon je ne serais plus là ! Mon modèle en tant que président a été Frédéric. Pendant les deux premières années je lui ai demandé qu’il soit disponible et encore aujourd’hui je lui demande relativement assez souvent conseil ; on n’a jamais fini d’apprendre ! Président d’une association ce n’est pas directeur d’une société, il ne faut pas mélanger : on travaille avec des bénévoles, on est nous mêmes bénévoles.

On est élu pour un mandat d’un an par le Conseil d’Administration qui nous accorde ainsi sa confiance.

Faire ce travail, ce n’est pas qu’exécuter, c’est aussi savoir écouter, c’est aussi trancher sans être partial quand il y a différents avis sur des sujets divers, alors que je suis convaincu par certains et m’apercevoir en Conseil d’Administration que les gens ne sont pas de mon avis et qu’il me faut donc réviser mon point de vue. Il faut savoir écouter les arguments des autres parce les nôtres ne sont pas forcément les bons et que l’on n’a pas forcément pensé à certaines choses.

Par contre en tant que président, j’ai un côté moins militant. Quand je dis militants j’entends plus ceux qui défendent l’ASTI et la FASTI au niveau de la libre circulation, l’installation et le droit des immigrés, droit de vote pour tous les étrangers à tous le niveaux ... C’est vrai que je suis peut être moins militant de ce côté là, moins dans la rue, moins dans les médias face aux journalistes. Moi je suis beaucoup sur le terrain ici au quotidien, parfois directement au service des usagers, c’est surtout ça ma préoccupation ; c’est vrai qu’après je suis moins dans les grandes revendications, dans les grands mouvements. C’est quelque chose dont j’ai tout à fait conscience. C’est pour ça aussi que le poste de président doit tourner, je trouve que 4 ans c’est une bonne moyenne mais il ne faut pas aller au-delà. Il y aura peut être après quelqu’un de plus militant.

A l’assemblée générale on remet son mandat en jeu, on est démissionnaire ; à ce moment là on dit si on veut être candidat ou pas, les adhérents votent pour le Conseil d’Administration et il faut avoir été élu à ce Conseil d’Administration pour avoir le droit de se présenter au bureau.

Ce qui est difficile, c’est de rester à sa place, de ne pas mélanger les investissements personnels et les intérêts de l’association. Des fois à trop travailler, à trop penser à l’ASTI, et nous sommes un certain nombre de personnes à l’ASTI à avoir ce défaut là, d’être trop impliqués, ce qui fait qu’au bout d’un moment on en arrive à un degré d’exigence trop important mais il ne faut pas oublier que l’on travaille avec des bénévoles qui ont les mêmes intérêts que nous , ceux de servir l’association, mais à un degré d’implication différent. C’est vrai que j’ai eu une période où j’ai eu envie que tout soit carré, nickel, que tout tourne bien, qu’on travaille tous de la même façon, et en fait non. La force d’une association, ce sont ces différentes personnes qui travaillent à différents moments , avec des méthodes de travail différentes même si effectivement, il faut un fil conducteur, on domicilie des gens, on fait beaucoup de choses d’ordre administratif et ç’est tout à fait logique qu’on le fasse tous de la même façon. C’est cette harmonie qu’on a voulu avoir, après les gens ne travaillent pas de la même façon. Je pense aux cours de français notamment, les formateurs ne font pas leurs cours de la même façon et ça c’est bien parce que même si les apprenants disent souvent que c’est un peu embêtant d’avoir des formateurs différents et des heures différentes, en fait ils ne se rendent pas compte qu’au final c’est aussi un avantage pour eux, parce qu’ils n’ont pas une seule manière d’apprendre mais quatre, puisqu’il y a quatre types d’enseignements différents. Donc ça aussi c’est une force de ne pas avoir quelque chose d’uniforme avec des gens qui travaillent de la même façon. En même temps nous ne sommes pas une administration donc pour moi une association c’est un endroit où l’on doit avant tout prendre du plaisir.

On ne vient pas que donner et je ne croirais pas quelqu’un qui viendrait me dire qu’il ne vient que donner. On vient aussi pour recevoir. Dans mon bénévolat de Président, je reçois énormément , presque autant que ce que je donne. Après il ne faut pas se cacher les choses moi je sais que je travaille en cuisine, j’ai envie d’avoir un peu de... on va dire un côté intellectuel que je n’ai pas dans la cuisine. C’est vrai que le travail de bureau, de secrétariat, encadrer des gens, ce sont des choses que je n’ai pas l’occasion de faire de mon boulot et c’est vrai que ça m’apporte un plus. Donc mon bénévolat, je le conçois comme ça aussi. Je viens prendre ces choses que je n’ai pas dans ma vie professionnelle. Tout en sachant qu’ici ce n’est pas une entreprise, il faut faire la part des choses. Même si on est très carré en début d’année sur les cours de français, parce que bon tu as vu le fouillis si on est pas carré alors que maintenant ça roule : les gens arrivent à l’heure ,on a presque régler tout ces problèmes de retard, ils savent où ils vont (...)

Le poste de président est un poste clé de l’association, si les gens ont pensé à toi ce n’est pas un hasard, c’est que tu dois sûrement dégager quelque chose, ils pensent à toi pour un an, deux, trois ans. C’est vrai que ce n’est pas du pouvoir qu’on a mais on décide de beaucoup de choses même si on les décide ensemble, même si de l’extérieur on en a pas l’impression. Mais il faut toujours avoir à l’esprit qu’il y a eut des gens avant et qu’on ne peut pas faire table rase quand on arrive de tout ce qui existe dons moi je suis un vecteur conducteur, j’ai pris des choses qui existaient et je dois faire en sorte de les faire continuer à exister tout en essayant de moderniser des choses, puisque le temps passe, tout en préparant l’avenir. Il faut toujours tenir compte de ce que les anciens ont fait. Et la crédibilité qu’on a face aux gens , parce que moi j’ai quand même été élu par une majorité d’anciens et si je n’avais pas tenu compte de leur boulot ou dénigrer leur travail précédent, je n’aurais jamais été élu pour commencer et je n’aurais pas été reconnu ; je pense parce que les gens ont voté pour moi quatre années de suite c’est parce que... cela dit il n’y a pas énormément de gens qui se présentent non plus. Mais bon, je pense que si j’avais fait du mauvais boulot je pense qu’il m’aurait dégagé et je me dis que ce que j’ai du faire a dû plaire. Puis, c’est peut être égocentrique mais il faut quand même à un moment dans la vie être sûr de ce qu’on fait et être persuadé que ce qu’on fait est bien. C’est savoir aussi demander aux autres quand on est pas sûr. (...)

Je fais en sorte quand je viens ici de connaître les apprenants, j’aime bien connaître les prénoms de ceux qui viennent d’arriver, enfin rester en contact avec eux quoi et qu’ils sachent aussi qui je suis. Quand je dis qui je suis, ça ne veut pas dire qu’ils sachent que je suis président de l’ASTI, ça ne m’intéresse pas et ça ne les intéressent pas non plus mais qu’ils sachent simplement que je suis en train de m’occuper d’un certain nombre de choses et que je travaille entre guillemets pour eux.

Le boulot du bénévolat je le fais pour eux, pas parce que je suis président mais parce que ça me plaît. Et ce que je veux qu’ils sachent et retiennent c’est qu’il y a des gens qui sont là en train de se défoncer pour eux, faire des trucs, c’est ça qui est intéressant. Alors après je ne connais pas d’autre président d’association mais j’espère qu’ils font le même boulot. Accueillir les nouveaux, faire des entretiens, le recrutement, présenter l’association, leur donner envie de rentrer dans l’association, les suivre, les accompagner.

J’en retiens beaucoup, beaucoup de plaisir.

Cet article vous a été proposé par :
Asti Bordeaux




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